Les horribles paroles des comptines françaises

 

L’importance des premiers contacts

En tant que parents, il paraît important de tenter d’inculquer un certain nombre de valeurs à nos enfants, et ce, dès leur plus jeune âge. C’est à ce moment que leurs cerveaux bâtissent les premières connexions, les premiers comportements. Autant qu’ils aillent dans la bonne direction tout de suite, car il est bien plus difficile de perdre une mauvaise habitude que de la prendre. Et les habitudes de pensée en particulier.

Bien sûr, les valeurs dépendent des croyances de chacun. Certains vont mettre en avant que, pour survivre dans le monde, il faut être costaud et prêt à donner tous les coups. Pour ma part, lorsque mon fils est né, je préférais qu’il fasse connaissance de l’empathie, la persévérance, l’espoir, et bien d’autres valeurs qui me sont chères. Mais dans tous les cas, la bienveillance est la plus grande des valeurs, de mon point de vue. Cela ne veut pas dire  pour autant « naïveté », mais ne pas être naïf n’implique pas non plus de systématiquement écraser les autres.

Importance de la musique

Naturellement, j’ai voulu aussi le baigner de musique, puisque je suis musicien. La musique est extrêmement puissante : elle fait appel à l’émotion. Or, on grave nos souvenirs et expériences avec d’autant plus d’intensité qu’ils sont accompagnés de grandes émotions.

Il a eu droit à des petits instruments pour s’amuser, un xylophone, un tambourin, comme la plupart des enfants de son âge. Mais évidemment aussi, je voulais lui chanter des chansons. Non seulement pour la musique, mais pour partager l’héritage qui est le sien, par les comptines typiquement françaises. Dans ce contexte, les paroles étaient particulièrement importantes pour moi.

Curieusement, j’ai eu beau chercher dans ma mémoire, je ne me rappelais d’aucune comptine entièrement. Des débuts de chansons et des mélodies fredonnées, mais ça s’arrêtait très vite.

Premières surprises des origines

En farfouillant un peu sur le web, quelle n’a pas été ma surprise de découvrir tout de suite que beaucoup, pour ne pas dire la plupart, des comptines ont des sens cachés. À croire que nos ancêtres étaient de sacrés lascars…

Au clair de la lune, par exemple, est donc en réalité une comptine… très… adulte. Le pire, c’est que même les adultes qui les chantent ne s’en rendent même plus compte, car les expressions ont changé ou on a oublié le contexte et on ne comprend plus leur sens d’origine.

Mais soit. Si même les adultes ne comprennent pas, les enfants n’y verront que du feu, avec leur petit esprit tout innocent.

Mais non, ce n’est même pas ça. C’est beaucoup plus explicite. Je veux bien qu’on endurcisse nos petites têtes, mais quand même…

Contact avec la réalité

Je me suis donc procuré quelques petits livres de chansons, car je voulais les chanter moi-même. En fait, lorsqu’on passe un enregistrement, le contact avec bébé n’est pas du tout le même. C’est beaucoup plus impersonnel. Alors que, chanté par un être en chair et en os en face de soi, c’est beaucoup plus puissant. Mais du coup, j’ai pu m’intéresser directement aux paroles, ce que je n’aurais sans doute pas fait si j’avais simplement passé des enregistrements.

Je me rappelle l’une des toutes premières comptines : une souris verte. Je me rappelais de la mélodie, chantée très souvent dans mon enfance. Mais après quelques couplets, stupeur : « trempez-la dans l’huile, ça fera un escargot tout chaud ». Hein, quoi ? Pour transformer une souris en escargot… en la trempant dans l’huile bouillante, il faut y aller de bon cœur.

J’ai tourné la page très vite en me disant « bon, je vais éviter celle-là… suivante ». Je ne me rappelle plus exactement lesquelles furent les suivantes. Mais ce dont je me rappelle, c’est une succession de déconvenues. À chaque nouveau début, je me disais « ah oui, celle-là est bien ! ». Et passé quelques instants, stupeur voire horreur. J’ai fait toutes les chansons du premier livre une à une. Je n’en ai pas trouvé une seule avec un message de bienveillance qui aurait mérité d’être sauvée.

Petit florilège…

La Mère Michel… hum, sachant déjà que le chat perdu est en fait sa chatte, mais passons. Même en la prenant au premier degré, on a affaire à une prise d’otage de chat, et un très explicite exemple de chantage. Belle morale !

Alouette, gentille alouette… je te plumerai… sans commentaire.

Il était une bergère, ronron petit patapon… elle tua son p’tit chaton – et pour pénitence elle doit embrasser le curé !… et trouve que c’est bien agréable et recommencera !!! Et dire que j’en avais un bon souvenir, de cette comptine !

Il était un petit navire… à quelle sauce manger un humain – on envisage vraiment toutes les possibilités. Miam !

Maman les p’tits bateaux : harceler son bébé en le prenant pour un âne et en lui racontant des mensonges, rien de tel pour l’éduquer !

Au feu les pompiers… la maison brûlée… et c’est pas moi qui l’ai brûlée… (pyromanie, délation…)

Le petit cordonnier qui bat sa femme en rentrant bourré…

Et tant qu’à faire, une histoire de viol dans « à la pêche aux moules » même pas déguisée.

On veut marier Jeannette avec un prince mais elle veut se marier avec Pierre… qui est en prison (qu’a-t-il fait pour y être ?)… et qui sera pendouillé… et Jeannette veut être pendouillée avec… bah tiens on les pendouille tous les deux. Littéralement.

Conclusion

Toutes les comptines ne sont pas à jeter. J’en ai trouvé dans d’autres livres qui étaient acceptables et mignonnes. Mais toutes relativement peu intéressantes pour le développement d’un enfant. Pirouette, cacahuète. Frère Jacques. Il pleut, bergère. Et certaines à vocation éducative pour apprendre des mots de vocabulaire. Mais moi qui étais si excité à l’idée de pouvoir chanter des chansons, le moins qu’on puisse dire est que j’ai été sacrément déçu – et choqué.

Très vite, nous sommes passés à autre chose : les fables de La Fontaine. Même s’il ne comprenait pas au début, il ne s’en est jamais lassé.

Ce problème simple qui défie les musiciens depuis des millénaires

Note : English version of this article here.

Avertissement : cet article traite de théorie de la musique, expliquée simplement aux musiciens ainsi qu’aux non musiciens, avec des mathématiques élémentaires (en utilisant des fractions simples). Le sujet est en fait assez méconnu, même des musiciens. À moins que vous ne sachiez ce que sont Werckmeister et Valotti, vous apprendrez quelque chose d’intéressant !

Depuis que la musique existe, les musiciens doivent accorder leurs instruments pour éviter de casser les oreilles de leur audience. Ce n’est pas seulement valable pour un orgue aux 20.000 tuyaux. L’un des instruments les plus simples, une flûte de bambou (ou d’os, quoi de plus romantique que de jouer son air préféré sur le tibia de votre chérie ? je plaisante…) avec des trous doit être construite avec minutie : un millimètre à côté, votre flûte sonnera faux.

Il y a 2500 ans, Pythagore, avec les quelques instruments simples dont il disposait à son époque, se cassa la tête sur les mystères de l’accord des instruments et créa le désormais célèbre « cycle des quintes », exposant l’impossibilité d’accorder parfaitement un instrument, quel qu’il soit :

Pythagore comprit que la musique est essentiellement des mathématiques : les notes, les harmonies, la tonalité, les octaves, sont faites de fréquences et de la manière dont ces fréquences interagissent. Nos cerveaux et oreilles analysent les fréquences qui ont des relations mathématiques particulières entre elles comme harmonieuses, et les autres comme dissonantes. En réalité, le cerveau aime tout ce qui est mathématiquement « beau ». C’est la raison pour laquelle nous adorons les symétries telles que celle-ci :

Revenons à la musique. Lorsque deux notes sont jouées simultanément, elles forment un « intervalle », qui est la distance entre leurs fréquences sonores respectives. Un intervalle est agréable à l’oreille lorsque les fréquences des deux notes qui le composent sont mathématiquement liées par une fraction entière. Dès que les fréquences des deux notes s’éloignent d’une telle relation mathématique, l’intervalle sonne faux, il casse les oreilles. D’ailleurs, un intervalle qui s’éloigne de cette perfection mathématique se met à créer des interférences et à « battre », ce qui est très pratique pour accorder des intervalles avec précision sur un instrument de musique. L’oreille est un organe très délicat et très précis.

Laissons la théorie pendant un instant et faisons un peu de pratique ! J’ai enregistré une quinte (5 notes d’écart sur un clavier de piano), l’intervalle Do-Sol sur mon épinette. L’épinette est un petit clavecin qui n’a qu’une seule corde par note, ce qui rend les choses plus faciles à entendre. Pour commencer, écoutons une quinte parfaitement accordée. Elle sonne juste, et surtout le son est régulier, il diminue d’intensité progressivement et sans à-coups (il est préférable d’utiliser un casque) :

Visuellement, le son ouvert dans un logiciel permettant de voir la forme des sons est une courbe descendante sans grande particularité :

Maintenant, désaccordons très légèrement le sol. L’accord se met à « battre », comme le montre la vidéo suivante. N’hésitez pas à la réécouter en suivant l’indication visuelle, jusqu’à ce que vous entendiez ces vagues qui font « wow, wow, wow… » :

Et lorsqu’on regarde la forme du son, les battements sont déjà visibles :

Désaccordons encore un peu plus le sol. Les battements sont plus rapides. À noter que ce n’est pas un effet digital, l’épinette sonne réellement exactement comme ça :

Cette fois, la forme du son indique très clairement ces battements :

Et pourtant, la seule chose que nous ayons fait ici est de changer très légèrement le sol, le faisant dévier de moins de 1% de sa valeur parfaite !

Regardons maintenant les différents intervalles qui peuvent être formés.

Prenons une fréquence et son double, on obtient une octave. Par exemple 440 Hz et 880 Hz.
Prenons les 3/2 d’une fréquence, on obtient une quinte parfaite.
Les 4/3, une quarte.
Les 5/4, une tierce majeure.
Les 6/5, une tierce mineure.

Dès que deux notes ne suivent pas ces intervalles précis, leur combinaison sonne faux et l’intervalle commence à « battre ».

Pour l’instant, tout va bien. Avec ce qu’on vient de voir, on pourrait tout simplement dire qu’il ne nous suffit plus qu’à accorder notre instrument avec des intervalles parfaits, et le tour est joué !

Sauf qu’en réalité, c’est là qu’intervient le problème : il est mathématiquement impossible de découper une octave en douze notes (les demi-tons) de manière à obtenir des quintes parfaites, sans même parler de quartes ou tierces parfaites. Pourquoi donc ? Ne nous en tenons pas à cette affirmation péremptoire, démontrons-la.

Une octave parfaite sonne généralement très bien. C’est la combinaison d’une fréquence et de son double, le cerveau est pleinement satisfait de la perfection mathématique qui en résulte. D’ailleurs, lorsqu’elle est parfaitement accordée, il est même parfois difficile d’entendre deux notes distinctes tellement elles se marient impeccablement. Arrivez-vous à entendre deux notes distinctes de cette octave enregistrée sur mon épinette ?

Avec son cycle des quintes, Pythagore, qui avait décidément d’autres choses en tête que des triangles, montra que, si on voulait accorder un instrument avec des quintes parfaites, les octaves que l’on obtiendrait sonneraient comme cela :

Ouille ! Vous allez avoir besoin de vous gratter les oreilles après une telle horreur. Je vous invite à réécouter l’octave parfaite au-dessus pour rétablir un certain calme dans votre oreille et votre cerveau agacé par autant d’imperfection.

Pythagore utilisa de nombreuses quintes et octaves pour faire sa démonstration, mais nous pouvons nous contenter de 5 notes pour aboutir au même résultat.

Calculons la différence entre un do et un ré de manière à avoir des notes parfaites. Do-sol est une quinte, c’est donc un intervalle 3/2 comme nous l’avons vu dans la table précédente. Cela veut dire que la fréquence du sol est 3/2 plus grande que la fréquence du do. D’autre part, ré-sol est une quarte, elle doit donc suivre un intervalle 4/3. Ce qui signifie que pour passer du sol au ré, nous devons diviser par 4/3.

sol = do × 3/2

ré = sol ÷4/3 = sol × 3/4 = (do × 3/2) × 3/4 = do × 9/8

Ré est donc 9/8 de la fréquence de do si on veut avoir des intervalles parfaits. Excellent ! Ce ne sont là que des mathématiques simples, passant d’une note à l’autre à l’aide de fractions.

Calculons maintenant la différence entre do et mi. Facile. Do-ré est un ton, ré-mi est également un ton, il y a donc également 9/8 entre ré et mi.

Ce qui veut dire que, pour passer de do à mi, il suffit de multiplier par le carré de 9/8, soit 81/64. Et 81/64 ≈ 1,265.

Une petite seconde ! Do-mi est une tierce majeure. Nous avons vu dans la table plus haut que les tierces majeures parfaites suivent un intervalle de 5/4. Mais 5/4 est égal à 1,25, pas 1,265. Pas loin. Mais pas exactement identique. Voilà notre première déception : si on veut construire ré de manière à avoir des intervalles justes, alors notre tierce do-mi ne peut pas être parfaite. On peut déjà imaginer que ce qui est vrai pour cette tierce va être également valable pour bien d’autres intervalles.

Par exemple, essayons de reconstruire une octave avec notre gamme composée de tons valant 9/8 chacun. Do-ré est 9/8, do-mi est 9²/8² (9/8 fois 9/8), do-fa# est 9³/8³, etc. :

Une octave composée de 6 tons est donc 9⁶/8⁶ ≈2,0273. Nous avons vu qu’une octave doit avoir un ratio d’exactement 2 pour être parfaite, pas 2,0273. Et voilà comment la perfection en musique disparaît sous nos yeux ou plus exactement nos oreilles. Et vous avez déjà entendu à quoi ressemble une octave à 2,0273 au lieu de 2, c’est tout simplement horrible ! Écoutons-la encore :

Il nous faut donc accepter un fait qui est dur à avaler : diviser une octave en douze notes ne va jamais nous permettre d’obtenir des quintes, quartes et tierces exactes. Des approximations très proches, mais jamais exactes. Quelle que soit la manière dont vous allez accorder votre instrument, il ne produira jamais d’harmonie parfaite. Quelle pensée agaçante pour un musicien ! Aussi parfaite que soit sa musique, elle sonnera toujours faux ! Et d’ailleurs, si l’on n’est pas extrêmement vigilant, certaines portions risquent même de casser sérieusement les oreilles.

Nous n’allons pas rentrer dans davantage de détails. L’essentiel est d’avoir compris que la perfection en musique est tout simplement inatteignable, et que pour produire 12 notes dans une octave européenne, il faut faire des compromis : si l’on veut que certains intervalles soient presque parfaits, il va nous falloir en « sacrifier » certains autres. Plus les uns sonneront à la perfection, plus les autres sonneront faux. Alors, certaines quintes ne seront pas exactement de 3/2, des quartes et tierces dévieront sensiblement de leur ratio parfait. En fait, tout va sonner un peu faux. Le but de l’accordeur et du compositeur est de minimiser les frictions dans l’oreille venant de ces imperfections. Pythagore a montré qu’on peut effectivement accorder la majeure partie d’un instrument de manière presque parfaite, mais qu’on obtient alors inévitablement un intervalle atroce qui sonne terriblement faux qu’on appelle typiquement « la quinte du loup », tellement cet intervalle sonne comme le hurlement d’un loup.

Depuis Pythagore, de très nombreux musiciens ont tenté de trouver une solution à ce problème, d’une manière ou d’une autre, découpant l’octave en 12 notes de manières toutes plus ingénieuses les unes que les autres. Ces différentes variations, ces différents découpages, sont appelés « tempéraments ». Cela peut évoquer aux amoureux de musique classique le titre de l’œuvre de J.S. Bach « Le clavier bien tempéré ». Au XVIIIème siècle, il existait de nombreux tempéraments, chacun avec ses avantages et inconvénients, la plupart n’autorisant pas de jouer dans certaines tonalités, comme le Werckmeister et le Valotti que j’ai cités en début d’article. L’œuvre de Bach « Le clavier bien tempéré » utilise de très nombreux intervalles pour montrer de manière pratique les applications du tempérament qu’il avait développé et qui permettait de jouer dans n’importe quelle tonalité sans problème et sans être gêné par une quinte du loup.

D’autre part, dans chaque tempérament, les musiciens réalisèrent que chaque tonalité avait sa propre « humeur », certaines tristes, d’autres joyeuses, d’autres encore inspirant l’angoisse, à cause des différents intervalles majoritairement utilisés dans chaque tonalité qui sonnent plus ou moins juste. Du coup, ces musiciens se mirent à choisir très précisément la tonalité et le tempérament de leurs compositions en fonction de l’atmosphère qu’ils voulaient leur donner.

Voici un exemple de classification par différents compositeurs comme Charpentier ou Rameau:

  • Do majeur : joyeux
  • Do mineur : triste, deuil, chagrins amoureux
  • Ré majeur : drôle, triomphant, victorieux
  • Ré mineur : calme, grave, tendre, dévot
  • Mi b majeur : pathétique, cruel, sévère, dévot
  • Mi b mineur : horrible, anxieux
  • Fa majeur : tempête, furieux
  • etc.

De nos jours, un tempérament particulier est devenu la référence pour presque tout le monde (excepté la musique baroque et renaissance, principalement) : le « tempérament égal ». Il fut inventé il y a plusieurs siècles et même décrit autour de 400 de notre ère par un mathématicien chinois, et bien que des méthodes existent depuis le XVIIIème siècle pour l’accorder à l’oreille, il ne peut être réellement atteint qu’à l’aide de la précision des instruments électroniques. Ce tempérament, plutôt que de faire des compromis et favoriser tel ou tel intervalle, rend chaque intervalle aussi bon/mauvais que les autres. Il consiste simplement en un découpage de l’octave en 12 parts parfaitement égales. Son acceptation n’a pas été facile et certains musiciens le critiquent encore aujourd’hui : il n’a pas de « couleur ». Que vous jouiez votre morceau en do ou en sol# n’a aucune importance, il sonnera toujours pareil, à une hauteur différente, mais avec les mêmes harmonies. Dans tous les autres tempéraments, comme on a pu le voir, chaque tonalité a sa propre « humeur ». Il est même parfois impossible de jouer dans certaines tonalités parce que cela sonne horriblement faux, comme si on jouait sur un de ces pianos désaccordés des bars des années 1900 aux États-Unis. En tempérament égal, rien ne sonne parfaitement juste mais rien ne sonne totalement faux non plus. Aucun intervalle n’est parfaitement juste à part les octaves. Notre oreille s’y est habituée avec le temps mais l’expérience d’écouter d’autres tempéraments peut parfois être une vraie révélation pour certains. Tout dépend de votre oreille, de vos attentes, de votre envie de découvrir autre chose, etc.

Nous allons nous arrêter là pour cette rapide introduction sur les tempéraments en musique. C’est un sujet qui a fait couler beaucoup d’encre et alimenté les conversations pendant des millénaires. Et c’est loin d’être terminé car des gens se penchent toujours sur le problème, tentant des nouvelles approches pour découper l’octave de différentes manières par des compromis différents, frustrés par la totale imperfection du tempérament égal. J’espère que cet article vous aura intrigué, vous aura fait approcher la musique sous un angle différent et montré ce problème pourtant simple qui agace les musiciens depuis que la musique existe.

Pour des exemples sur la manière dont différents tempéraments affectent la sonorité de la musique, vous pouvez vous rendre sur la page wikipedia (en anglais, mais il suffit de cliquer sur les boutons ► à droite, on entend clairement les intervalles qui sont vraiment faux, le premier exemple en “just intonation” est particulièrement horrible dans certains passages).

The Simple Tuning Problem that has Defied Musicians for Millennia

Note : Cet article en français

Foreword: this article is about music theory, explained to non-musicians and musicians alike, with very simple math (all you need is basic fractions). Unless you know Werckmeister and Valotti, you will definitely learn something cool from this article. 🙂

Musicians have always had to tune their instruments to avoid having their audience’s ears bleeding. This is not only true for an organ that has 20,000+ pipes. One of the simplest instruments, a flute made of a stick of bamboo (or a bone, can you think of anything more romantic than playing your favorite tune on your sweetheart’s tibia?… just kidding) with holes in it has to be constructed very carefully: move a hole by a single millimeter, your flute will sound out of tune.

2500 years ago, Pythagoras, with the limited instruments of the time, racked his brain on the problem of tuning and finally devised the “circle of fifths”, exposing the impossibility to tune any instrument perfectly:

Pythagoras understood that music is essentially mathematics: notes, harmonics, pitches are all about different frequencies and how these frequencies interact with each other. Our brains and ears recognize matching frequencies as harmonious and non matching frequencies as dissonant. In fact, the brain loves everything that is mathematically related. That is why we love symmetries such as these:

Back to music. When two notes are played together, they form an “interval”, which is the distance between their respective frequencies. Intervals sound great to the ear when the frequencies of the two notes composing the interval are mathematically related by integer fractions. If they are out of tune and too far from a perfect ratio, they start sounding bad. Besides, any listener will hear “beats” as soon as the interval is a little off, which makes it easier to tune perfect intervals with a very good precision, the ear is a very delicate and precise organ.

Let’s hear what it sounds like! I have recorded a simple fifth, C-G, on my spinet, an instrument that has only one string per note, which makes hearing things more simple. First, let’s listen to a fifth that has been perfectly tuned, it sounds regular, fading away slowly (for best results, use a headset):

Visually, the sound wave is a gradually decreasing sound:

Now when this fifth starts getting out of tune, it starts “beating”, follow the visual indication. If needed, play the video a couple of times until you clearly hear the beats:

The beats clearly show on the audio wave:

Finally, when the fifth is clearly out of tune, the beats get faster, note that this is not a digital sound effect, this is exactly how it sounds on my spinet:

And when looking at the sound wave, the beats are even more visible:

And the only thing I did was to change the G very slightly, actually less than 1% of its perfect value!

Now, let’s have a look at the different perfect intervals that can be formed.

Take a frequency and its double: you have an octave. For instance 440 Hz and 880 Hz.
Now take 3/2 of a frequency, you have a harmonious fifth.
Take the 4/3, you get a fourth.
5/4, a major third.
6/5, a minor third.

Remember, as soon as two notes don’t respect these perfect intervals, they start sounding “off” and their combination starts “beating”.

So far, so good, everything looks pretty simple, we just need to tune our instrument using perfect intervals, et voilà!

But here comes the problem: it is mathematically impossible to slice an octave into 12 notes (called semitones) that have perfect fifths, forget even about perfect fourth or thirds. This assertion might sound blunt. We need proof! Let’s dig into the problem.

An octave is generally very “round” to the ear. It’s the combination of a frequency and its double, the brain is very satisfied with that. In fact, when tuned correctly, it is even sometimes difficult to say that there are actually two notes there, they “blend” perfectly. Can you hear the two notes here making an octave:

With his circle of fifths, Pythagoras proved that, if you wanted to tune your instruments so that it would have perfect fifths, your octave would sound like this:

Ouch! Your ears could do with some little extra care now. You can listen to the perfect octave above to get away from this annoying sound ringing in your ear. While Pythagoras used many fifths and octaves to prove this, we can actually use just 5 notes to demonstrate it.

Let’s calculate how much we have between C and D if we want to maintain things perfect. C-G is a fifth, so it is a 3/2 interval, as we have seen in the table just above. This means that G is 3/2 of C. D-G is a fourth, so it is a 4/3 interval. Which means that to go from G down to D, we have to divide by 4/3:

G = C × 3/2

D = G ÷4/3 = G × 3/4 = (C × 3/2) × 3/4 = C × 9/8

So D is 9/8 of C when building it with perfect intervals. Great. This is just simple math, jumping from one note to the other using basic fractions.

Now, let’s see what we have between C and E. E must also be 9/8 of D, as it is a normal tone in the scale, no different than C-D.

So E must mathematically be 81/64 of C. And 81/64 ≈ 1.265. Wait a second. C-E is a major third. We have said earlier that perfect major thirds use a 5/4 interval. However, 5/4 = 1.25, not 1.265. Close. But not exact. That’s our first “uh-oh” problem: when we use perfect intervals to build the interval C-D, we can no longer create perfect intervals for the major third C-E, and you can guess that it will also be the case with other intervals.

For instance, let’s go on to the next octave using 9/8 as a step for a tone. C -> D is 9/8, C -> E is 9²/8² (9/8 times 9/8), C -> F# is 9³/8³, etc.:

So an octave constructed with 6 tones is actually 9⁶/8⁶ ≈2.0273. But we said an octave needs to have a ratio of 2 to sound perfect, not 2.0273. Oh well, here goes perfection in music! And you heard what 2.0273 instead of 2 sounds like before, it’s simply horrible! Let’s play it again:

At this point, we have to accept one fact that is hard to swallow: dividing an octave into 12 notes is never going to produce exact fifths, fourths or thirds. Very close approximations of them, but never exact. However you tune your notes, they will never sound perfect. Such an annoying thought for a musician! However perfect his music is, it will never sound right! And not only will it not sound perfect, some of it will sound pretty nasty if you’re not extra careful.

We will not go into much more detail. At this point, you came to realize that when cutting an octave into 12 notes to produce the standard European scale, you have to make trade-offs: if you want some intervals to sound close to prefect, some other intervals will have to be sacrificed. Some fifths will not be exact 3/2 intervals. Some thirds will be really off from their exact intervals. Mostly everything will be off, really, ever so slightly. The goal is to find a slicing that minimizes the roughness in the ear coming from all these intervals that are off. Pythagoras showed that you could tune most notes almost perfectly but that you would then have an inevitable rogue interval that would sound so terrible that it is called a “Wolf interval” since it howls like a wolf when you hear it!

Many musicians since Pythagoras have tried to address the problem in one way or another, designing “the best slicing” of their choice. These different variations in slicing the octave cake are called “temperaments”. If you know a little about classical music, this could remind you of the title of J.S. Bach’s “Well-Tempered Keyboard”. In the 18th century, there were many different temperaments, each suffering from various problems when playing in different keys, such as the Werckmeister and the Valotti cited in the prologue of this article. Bach’s work “The Well-Tempered Keyboard” uses many intervals in order to give a practical demonstration of his temperament in which you could play in various keys without problem and without hearing any wolf interval.

Besides, with a given temperament, musicians started to understand that every key had a different “mood”, some sad, some scary, some joyful, due to the different parts of the melody that sounded rounder or harsher than the others depending on which intervals they were using most. Therefore, they chose the keys of their compositions very carefully.

Here is an example of a classification from various composers such as Charpentier or Rameau:

  • C major: joyful
  • C minor: sad, mourning, love sorrow
  • D major: funny, triumphant, victory
  • D minor: calm, grave, tender, devotion
  • E flat major: pathetic, cruel, harsh, devotion
  • E flat minor: horrible, anxiety
  • ..
  • F major: storm, furious
  • etc.

Nowadays, one temperament is used almost universally (except for baroque players, mostly): the “equal” temperament. It has actually been invented some centuries ago (in fact, a Chinese mathematician described it around 400 AD), but it can be tuned perfectly only with the precision of electronic devices (although there are methods to reach very good approximations of it, people began to use it in the 18th century). Rather than making compromises, the equal temperament makes every single interval as equally good/bad as the others. Basically, the octave is cut into 12 absolutely equal pieces. This is why some musicians criticize it and why it faced some resistance before being adopted: it has no “color”. Whether you play your tune in C or in G flat, it will sound exactly the same, at a different pitch, but with the same harmonics. In other temperaments, as we have seen, every key has its own “mood”. You may not even be able to play some keys in some temperaments because they will sound hideous, as if you were playing on one of those out of tune pianos in the pubs of the 1900s. But in equal temperament, nothing sounds exactly right at all, it is just never totally hideous either. In fact, in the equal temperament, no single interval is perfect, except for the octave.

This is it for a very short introduction to music theory of temperaments. Many books have been written on the subject, and it is still not over as people still come up with new ideas to get the best compromises out of a scale. I hope this has intrigued you and made you wonder a little more about this simple problem that has annoyed musicians for thousands of years.

For some examples of how a temperament can affect how you hear things, you can have a look at the Wikipedia page for musical tuning and listen to the samples in the “Systems for the twelve-note chromatic scale” section, the “just intonation” is particularly telling!